Evacués le 1er septembre 1939 et échoués le 9 septembre dans le petit village de Bonnes sur la Dronne en Charente, où personne ne les attend et où absolument 

rien n’est prévu pour leur hébergement, les Farébersvillois ont à faire face à de grandes difficultés.

Pourtant, ils s’organisent avec l’aide des Bonnois même si apparemment une barrière linguistique les sépare : le platt ! Les Mosellans parlent peu ou mal le français et les Charentais ne comprennent rien au dialecte qui ressemble étrangement au deutsch parlé par l’ennemi allemand.

Des liens se créent cependant : les ménagères échangent leurs recettes de cuisine, les hommes trouvent du travail dans les fermes environnantes, les enfants vont à l’école.

On embauche dans la tuilerie, on recrute des bûcherons ; la poudrerie d’Angoulême accueille à bras ouverts les ouvriers à reclasser.

Les mineurs non appelés sous les drapeaux trouvent bientôt  du boulot  dans le Pas-de-Calais, et surtout à Montceau-lès-Mines.

La famille Kleinhentz Jean-Nicolas et d’autres partent activer la production charbonnière le 11 décembre 1939. Reconnus affectés spéciaux et participant à l’effort de guerre, on signifie à ces mineurs que mis à la disposition des Houillères du Centre, ils doivent en cas de mobilisation générale rejoindre les bureaux de recrutement désignés. Celui de mon grand-père Jean se trouvait à Mâcon.

La vie n’y est pas facile ; rassemblés dans des baraquements construits à la va-vite, ils sont obligés  de faire de longs trajets pour aller travailler ou acheter des provisions. On ne se plaint pas , c’est la guerre.

Le 10 mai 1940, c’est la guerre-éclair. Des nouvelles inquiétantes proviennent de partout. On apprend que le village de Farébersviller a été  détruit à plus de 50 % par l’opération Torche qui servit aux Allemands à occulter la percée de Sedan.

L’inquiétude tourne ensuite au cauchemar : c’est la défaite française et Pétain conclut l’Armistice le 22 juin 1940.


Tous les Alsaciens-Lorrains doivent rentrer suite  aux clauses de l’Armistice.

De retour au pays, les Farébersvillois trouvent leur village en ruines ; maisons éventrées, sans toits, sans fenêtres, sans meubles.

 Devant ce désastre, il faut tout recommencer à zéro et s’entraider pour pouvoir s’abriter : c’est l’époque du Wiederaufbau  (la reconstruction).

 Mais le cauchemar ne s’arrête pas là puisque la population va subir l’annexion, la germanisation, l’incorporation de force de la jeunesse, la déportation…

A travers l’histoire des villageois, j’ai pu reconstituer le vécu de mon grand-père qui, à sa manière, a résisté à l’occupation allemande et en a payé le prix fort.