Farébersviller, le 9 juillet 1945.

 

Cher Parrain,

 

Comme vous le savez, papa a été pris par les SS .Maman a été malade, quand ils sont venus pour l’emmener, avec Denise et moi. Voilà pourquoi nous sommes restés à la maison.

Papa a dû rester deux ans en Allemagne. Il s’est évadé et il est rentré chez nous, huit jours avant la bataille. Malheureusement, il a été blessé le premier jour de la bataille par des éclats d’obus. Après une semaine, il a été transporté à l’hôpital de Nancy où il est resté longtemps, sans qu’on sache où il se trouvait. Il a perdu à la main droite un doigt, deux doigts sont raides, la main est très atrophiée. Il avait des éclats dans le dos et dan s la jambe.

Les Allemands nous ont tout volé. Notre maison est entre deux ponts que les Allemands ont fait sauter. La maison n’est presque plus habitable. Elle s’est écroulée à moitié. Une grande partie du toit n’est pas encore couverte. Les murs sont troués. Quand il pleut, l’eau coule dans les chambres par la porte de devant et par la grange, car les conduites d’écoulement vers la rivière ont été écrasées par les tanks. Nous nous sommes sauvés avec notre maman dans la cave de l’école. Quand après la bataille, nous sommes sortis de la cave, notre maison n’avait plus de portes ni de fenêtres. Il ne nous restait que quelques pommes de terre comme nourriture. Nous avons dû les mettre dans la cave de la voisine.

Ma vieille tante, qui a perdu tout dans notre cave, même son argent, a maintenant une maladie des nerfs. Mais je suis bien content, car les méchants Allemands sont partis. S'ils avaient eu assez d’autos, ils nous auraient tous emmenés en Silésie. Sarrebruck a été bombardé et il y avait du travail là-bas. Mais nous sommes restés à la maison.

Cher parrain, je vous envoie un bon baiser de notre chère Lorraine redevenue française.

 

Votre filleul Justin Thirion, 9 ans.