Tragédie dans la famille Houlle :
HOULLE Edouard (1891-1914)
Au printemps 1919 les gendarmes français à la moustache altière s’enquièrent de son sort. Ils le recherchent comme déserteur ayant fui les bataillons d’Afrique (Bat’daf). L’intéressé s’était en effet enrôlé en 1912 pour connaître du pays. Son tempérament courageux lui valut d’être expédié en Algérie.
La vie dans les bleds n’était pas de tout repos : ainsi, la nuit, des « buissons ardents » d’ennemis s’approchaient et tâtaient de la sentinelle.
Pourquoi déserta-t-il ? Nul ne le sait, mais sa mère rapporta qu’elle le vit revenir tel un clochard, ayant fait le trajet du port de Marseille jusqu’à Pfarrebersweiler à pied. C’était en 1914, veille de la guerre.
La population dès les premiers jours du conflit apprend avec stupeur coup sur coup la mort de deux des siens : Paul Eugène à Saint Quentin le 28/08/1914 du 78ème Régiment (7ème Compagnie), Savard Paul à Souille ( Verdun) le 29/08/1914 du 130ème Régiment d’Infanterie de Lorraine. Ce régiment dans lequel est incorporé HOULLE Edouard fait partie de la Vème Armée du Kronprinz. Dépendant du 16ème Armee Korps, il vient de Thionville et s’enfonce dans le saillant de Verdun. Les combats s’échelonnent du 29/08 au 14/09 pour conquérir les passages de la Meuse. Les Français après avoir souffert se redressent victorieusement sur la Marne mais ne profitent pas du succès. L’attaque nocturne sur Heippes coûte la vie à Edouard. Voici l’historique du régiment 130 dans lequel sont enrôlés de nombreux Lorrains (source : Erinnerungsblätter deutscher Regimenter- 1. Lothringisches Infanterie Regiment n°130).
L’attaque nocturne de Heippes- 10/09/14
« Alors que la première et quatrième armées s’étaient retirées de la Marne, la cinquième armée prit la décision de faire sentir aux Français ce qu’était le poing invaincu des Allemands. Les 13ème et 16ème corps d’armée eurent pour mission d’attaquer dans la nuit du 10/09 la ligne Erise-la-Petite-Sérancourt-Heippes.
Alors qu’il manquait totalement de préparation, le régiment reçut tard dans la soirée du 9/09 l’ordre d’attaquer Heippes pendant la nuit. Les hauteurs de Heippes étaient occupées par les Français du 150ème bataillon. A minuit, le regroupement eut lieu à saint André et partant à midi trente de la sortie est du village, il marcha sur Heippes dans l’ordre suivant :
1) 1/3 du premier pionnier 16,
2) les 12ème et 10ème compagnies de mitrailleurs 9, ainsi que la 98ème compagnie de mitrailleurs 11 et un bataillon du 144ème. Baïonnette au canon, la culasse dans la poche, les compagnies ‘avancèrent sur deux colonnes.
Plongé dans un silence lugubre, le Bois d’Ahaye surgit des ténèbres. L’odeur de cadavres et des traces non encore effacées rappelaient cette journée sanglante du 6/09.
Une pluie fine couvrait le bruit des pas de milliers d’hommes, le grincement des véhicules, le souffle des chevaux haletants. Mais Dieu merci, nous étions sortis de l forêt. En avant ! Nous ne pouvions plus être très loin du village.
Soudain on cria : « Qui vive ! ».
« En avant, hourra ! » hurla le capitaine Kiesow et il passa à l’assaut avec sa 2ème compagnie.
A ce moment, un feu de l’infanterie et de mitrailleurs s’abattit sur le régiment, un feu qui venait de devant, de droite et de gauche. C’était un vacarme assourdissant ! L’avance était bloquée. Les gars gisaient sur la route ou dans les fossés remplis d’eau. Les uns recherchaient une couverture, les autres tiraient dans l’obscurité à l’aveuglette.
Les mitrailleurs de la compagnie en avant-poste tirèrent sur leur gauche d’où ils crurent reconnaître la provenance des tirs. Sabre au clair, le colonel von Lengerke entraîna les compagnies au cri : « En avant, l’infanterie ! ».
Aussitôt il tomba ainsi que Heine, son aide de camp, frappé à mort tandis que le bataillon et le capitaine Rehfeld en tête des 12ème et 10ème compagnies bifurquèrent à droite et tentèrent d’enlever la côte 342. Dès que la distance avec l’infanterie était devenue trop importante, la compagnie de mitrailleurs passa à la charge sur une route jonchée de morts et de blessés et fit sa jonction, juste devant le village, avec le 1er bataillon qui venait d’être repoussé et dont le chef était blessé.
D’abord elle fit feu avec 6, puis avec 12 mitrailleuses (avec la 98ème compagnie de mitrailleurs) sur le village et orienta son tir sur le flanc gauche. Au bout d’un certain temps, l’ennemi fut réduit au silence à cet endroit-là. A l’arrière des mitrailleuses, le capitaine Kiesow rassembla les hommes qui restaient du 1er bataillon.
Entretemps, le 2ème bataillon formé des 12ème et 10ème compagnies avait dû abandonner de nouveau la première tranchée qu’avait occupée le 341ème R.I. Le capitaine Rehfeld et les aides de camp Drabeck et Kämmitz étaient tombés. Le lieutenant Wiedermann gisait dans le fossé atteint d’une balle au ventre qui lut fut fatale. Il pleuvait des cordes et de tous les côtés on entendait sans interruption le sifflement des balles et le crépitement des mitrailleuses. A nouveau, le capitaine Nicolai avança avec les bataillons 12 et 10 vers la côte 342, s’empara et occupa la première tranchée à 3h55 du matin. Toute la velléité de poursuivre un quelconque assaut fut enrayée par le tir furieux des Français. A l’aube, le lieutenant Stahel, conduit par le prudent adjudant de réserve Badecker de la 3ème compagnie pénétra dans le flanc nord de l’ennemi et, avec deux mitrailleuses, soumit la 2ème tranchée française sous leur feu. C’est alors que de leur côté les hommes de Nicolai se lancèrent à l’assaut et s’emparèrent des tranchées jonchées de cadavres. A 5h20 du matin, la côte fut enlevée. Des sections entières s’enfuirent sous le feu des mitrailleuses et on emmena 200 prisonniers.
10/09 au 12/09/1914
Tandis que le capitaine Nicolai s’apprêtait à effectuer un ultime assaut, le capitaine Kiesow pénétra avec 200 hommes dans Heippes jusqu’à la sortie est. A 6h30, le 1er/144ème prit la relève des hommes du régiment qui se trouvaient sur la côte 342 sur ordre de la Division qui avait été informée de façon tout à fait inexacte sur les succès et la position du régiment.
Ceux-ci se rassemblèrent dans un ravin à l’ouest de la côte 342 où l’adjudant Weiss avec les conducteurs de la compagnie des mitrailleurs avait fait 30 prisonniers à 4h. Les 9ème et 11èmes compagnies qui venaient d’être relevées, se rassemblèrent à St André où la compagnie des mitrailleurs fut d’ailleurs également transférée quand à 6h de l’après-midi, le régiment (sans la compagnie Kiesow) installa son bivouac dans le ravin à l’est de St Pierre. Al’école de St André, des médecins formidables travaillaient infatigablement depuis 2h du matin et ce jusque tard dans la nuit.
Pertes : 10 officiers- 86 sous-officiers et soldats.
Blessés : 10 officiers-271 sous-officiers et soldats.
Disparus : 0 officier-65 sous-officiers et soldats.
Comme les 4/5èmes du corps des officiers n’étaient plus disponibles et que les pertes en hommes étaient grandes, le reste du régiment dut dès le lendemain matin se regrouper en 2 bataillons de 3 compagnies. Le champ de bataille fut évacué et à cette occasion quelques soldats isolés furent faits prisonniers. Le colonel von Lengerke, les lieutennats Heine et Kämnitz furent enterrés au cimetière de St André. Le commandant Haupt prit le commandement du régiment au cours de l’après-midi et ses bataillons reçurent l’apport de 4 compagnies lorsque le détachement de Kiesow fit son apparition…
FORMERY Alphonse, rescapé de la bataille put témoigner : « Edouard n’était que blessé à la hanche. Je l’ai encore vu au cours du combat me dire qu’il allait se faire soigner à l’arrière. Dans l’anarchie des tirs, il a dû mourir frappé par une balle allemande ! ».
HOULLE Justin (29/01/1896-porté disparu le 30/06/1916).
C’est le fils chéri (Choustin). La mère en apprenant sa mort, après celle d’Edouard, va se murer dans le silence et ne toléra plus aucun rire d’nfant chez elle.
« Mouta, Ich koume nie me em ! » « Maman, je ne reviendrai plus à la maison. »
Son frère Nicolas Houllé (+1978) témoignait : « Mon frère Justin avait très peur des Cosaques qui, sur leurs rapides destriers, décimaient avec les moulinets ravageurs de leurs sabres des sections entières. Je lui conseillais de se « ducken » (se blottir dans les tranchées).
Des combats l’opposant aux Russes vont se dérouler durant la semaine fatidique du 23/06 au 30/06/1916. Sur le plan, on constate que les Russes ont doublé les tranchées devant sa 9ème compagnie.
HOULE Justin mourut-il, lui aussi comme son frère, sous les propres tirs des obus allemands |
La bataille du 30 juin 1916
Y participent : les Régiments 201, 202 dont les I, II, III bataillons sont répartis en 12 compagnies. Dès 5h du matin, commença la préparation d’artillerie à laquelle se mêlèrent à 6h les Minenwerfer sur les deux tranchées des premières lignes russes, échelonnées le long de la route Pustomyty Watyn. Hélas, c’était comme si rien n’avait été entrepris, car aucune observation résultant d’un ciel couvert et d’une brume humide ne put constater les dégâts occasionnés par les obus.
Le Commandeur put néanmoins s’avancer à cheval avec son état-major jusqu’aux avant-postes. Il se rendit alors compte de l’inefficacité des tirs. Il se fit surtout du souci quant au résultat à escompter de l’attaque prévue d’autant qu’on disposait de peu de munitions d’artillerie.
L’ordre survint : heure d’attaque différée à 12h30. Le temps s’améliora. Cà et là, intervenait un coup au but mais au résultat bien maigre.
A 12h20, la première vague d’assaut du IIIème bataillon/201 s’avança, derrière suivait à 50 mètres la seconde avec 4 mitrailleuses, puis à 100 mètres la dernière avec la même puissance de feu.
Les 2 compagnies non remplacées (les 9èmes et 10èmes compagnies du 202) ne s’impliquèrent dans l’attaque que sur 20 mètres et préférèrent rester empêtrées sous le feu ennemi.
Il manquait au IIIème bataillon (sous les ordres du major Freiherr von Wedekind) du soutien et de l’appui sur ses flancs. Aussi la 8ème compagnie du IIème bataillon dut-elle lui prêter main forte rapidement.
Sous les tirs inébranlables des Russes, les vagues d’assaut avancèrent dans les champs de hautes céréales jusqu’au réseau de barbelés- d’ailleurs peu entamé- grignotèrent avec leurs cisailles, les obstacles puis sautèrent dans la première tranchée ennemie.
D’abord peu nombreuses, nos sections grossirent avant d’entamer la seconde ligne. Les Russes furent maîtrisés à l’aide de grenades à manche dans ce combat rapproché.
Au nord de la grande dépression, tout le dispositif ennemi était submergé mais faiblement regarni par os troupes. Les vagues s’étaient mélangées et l’ensemble du bataillon avait viré vers la droite, par manque de communication avec une autre compagnie.
Au sud de ce bassin, les compagnies 9 (celle de Houllé Justin) et 10 ne purent occuper que la première tranchée et subirent les tirs de flanquement du fait des deux compagnies traînardes du 202 à l’esprit combatif émoussé.
Le IIIème bataillon put toutefois avec du cran et louable énergie s’avancer –comme sur le Mort- homme le 20 mai à Verdun- puis conquérir le but assigné : investissement des deux premières tranchées russes.
Les événements étaient confus sur le flanc droit mais rien pour l’instant ne pouvait y être changé. Le IIème bataillon (major Platz) s’était échelonné à 100 mètres du IIIème dès l’assaut. Ils se retrouvaient situées en lisière de forêt derrière le flanc droit de la 7ème compagnie et attenantes au Q.G. du bataillon.
Leurs compagnies mélangées furent réparties en trois colonnes et s’avancèrent dans cet ordre.
Lorsque le IIIème bataillon atteignit les barbelés, l es compagnies des IIème et IIIème se mélangèrent à nouveau pour nettoyer avec courage les premiers et deuxièmes fossés des Russes.
La 8ème compagnie appelée à a rescousse ne put participer à l’élan, seules les compagnies intermédiaires et la 5ème avancèrent bien à gauche. La 5/201 investit la même colline, s’enterra et fit la jonction avec la 7/202.
Si quelques prisonniers russes se rendirent, soixante à soixante-dix autres se rassemblèrent à moins de 50 mètres dans les champs de blé pour nous éjecter des tranchées. Mais quand ils virent nos quatre à cinq Pickelhauben (casque à pointe) ils détalèrent. Même leurs officiers filèrent un bon train.
A 14h50, de faibles contre-attaques russes purent être contenues sur le flanc gauche de Watyn.
Constatation du Commandeur (après 15h)
- Progression du I/202 dans les champs de moutarde
- Réussite de l’attaque du 201
- Manque de renseignements sur l’aile droite positionnée dans la grande cuvette (Cies 9 et 10).
Aussi, partit-il s’enquérir de la situation vers l’avant, en espérant pouvoir disposer du 1er Bataillon constitué comme réserve de la division. Il portait tout son espoir sur le II7me bataillon qu’il comptait vite rejoindre.
Arrivé, au I/201, il se renseigna sur la situation dudit bataillon : hélas, il ne pouvait disposer de ce renfort.
Il devait être 16h, la situation s’emballait sur le flanc droit : les Russes attaquaient. Mais rien ne pouvait être décelé depuis ce secteur. Aussi envoya-t-on des officiers aux nouvelles. Et bientôt parvinrent des cris, des bruits de combats, des tirs de fusils et de mitrailleuses.
Aucun doute : la contre-attaque intervenait et pas moyen de disposer du premier bataillon.
Compte-rendu de la situation
A travers la cuvette et du haut de la côte 235, se pressaient en profondeur et en largeur des sections russes.
Aperçues en ligne de mire à 1800 mètres, elles furent prises précocement sous les feux de fusils et des MG. Pourtant elles continuaient à affluer et cette vision (rapportée par le lieutenant Timmermann du 1/201) déprima fortement nos troupes.
C’était un fait que le Russe avançait inexorablement et sans souci des pertes.
Le feu d’arrêt de notre artillerie sollicitée resta pratiquement sans effet sur l’avancée ennemie. Pourquoi ne réagissait-elle pas mieux sur une telle cible ?
Les Russes affluaient au pas de charge, les balles n’avaient aucun effet sur eux.
On observa même comment les Cosaques à cheval faisaient avancer sous la menace des lances leurs propres troupes.
L’attitude et la conduite des opérations russes se répétaient à l’identique : dès la perte de leurs positions, les Russes contre-attaquaient avec des forces disposées par rangées de 10 à 14 hommes en profondeur ! et sans souci de leurs pertes !
Le major von Wedekind se rendit au QG du premier bataillon et référa au Commandeur : « Rien ne peut être contenu là-devant ». On rameuta des réserves. Les revolvers furent dégainés, prêts au combat rapproché ! Des balles lumineuses furent tirées pour commander un tir d’arrêt à l’artillerie. Devant pareille situation, le Commandeur impliqua la réserve de la division (Premier bataillon).
Il s’agissait de parer au plus pressé et de consolider le flanc droit menacé. Il fallait protéger la cuvette par des tirs de mitrailleuses et tirer un feu de flanquement vers le nord et le nord-est.
Ce que firent toutes les armes lourdes du 1/201 ainsi que celles des mousquetons des 1ère, 2ème et 3ème compagnies.
En coopérant ainsi, le flux ennemi fut stoppé dans la cuvette et le danger parut écarté : les sorties de nos tranchées de position étaient fermement tenues. Le Commandeur du régiment s’apprêtait à filer vers le secteur gauche menacé lorsqu’un tir de barrage inouï provenant de notre propre artillerie s’abattit sur nos emplacements. Abstraction faite de nos propres pertes, cette violente grêle d’acier démoralisa encire davantage nos hommes.
Constat du major von Wedeking
…..Cette pluie d’obus provoqua de nombreux morts le long de nos positions. Les arbres pulvérisés qui cachaient notre position de retraite éparpillaient leurs branches au milieu de nos cadavres décimés par les éclats. On fit tirer des balles traçantes : 40 lucioles vertes pour déplacer le tir meurtrier. Cela ne servit à rien : nous bûmes le calice jusqu’à la lie car ce tir-trop court et trop tardif-ne fit aucune perte chez l’ennemi.
Le Commandeur, après ces déboires, put regagner le flanc gauche ; simultanément, une autre forte attaque russe venant de Watyn appuyait celle devant notre aile droite et menaçait fortement le bataillon I du 202 ainsi que nos compagnies (5 et 12).
« La situation devint dramatique devant la 5 ; notre artillerie s’impliqua bien faiblement et encore devant les positions des 6ème et 7ème Compagnies ». (major Platz su 1er bataillon).
Pendant que la menace à droite était conjurée, l’assaut russe fut déterminant sur notre gauche par notre manque d’appui et de réserve. Le repli des compagnies décontenança notre milieu.
Le front était percé. Sous les efforts conjugués de leurs encadrements, les compagnies des bataillons II et III/201 purent être reprises en main et reconduites dans notre première position (allemande).
Le Commandeur rallia les lignes enfoncées et signifia à ses subordonnées de tenir la position et de réorganiser les sections.
« Il est 18h. Le régiment 201 est à nouveau établi dans sa position, mais avec de grosses pertes il n’a pas perdu une once de terrain.
La nuit est tombée, aucun tir ne se fait entendre. Comme le Russe est venu, ainsi il est reparti : il voulait uniquement rétablir l’équilibre Pustomyty-Watyn ».
Le danger écarté, un major avec son bataillon (constitué en réserve) s’annonça. Comme une nouvelle attaque était à craindre et que les rangs s’étaient éclaircis, le major Hayner lui signifia l’ordre de consolider nos positions.
Nous utilisâmes les lueurs du crépuscule pour parcourir le champ de bataille, ramener les blessés, rassembler les hommes et les équiper pour un nouveau combat. L’ennemi n’attaqua plus : une nuit calme allait suivre.
Les IIème et IIIème bataillons avaient le plus souffert. Un ensemble de 25 officiers et 800 hommes fut mis hors de combat.
Les tués s’élevaient à 8 officiers et à 108 soldats.
HOULLE Nicolas: Pionier- bataillon 26
Formation à Graudenz
Comme mineur, il a été vite récupéré dans le corps des pionniers.
Il est engagé dans la bataille des lacs Mazures en 1914. Le 2 mai 1915, son régiment participe sous le commandement de Mackensen à la percée de Gorlice qui ouvre la porte vers Lemberg.
Il se retrouve affecté au 2 Kp/Pion bataillon 26 dépendant de la XIIème armée de von Gallwitz. Elle perce le front russe le 12 juillet 1915 à 2h du matin, le jour clair hâte les marches pénibles : les poux sautent par millions dans les cahutes insalubres à l’heure du repos. « Niema kleba » (pas de pain) : se lamentent les femmes polonaises.
Le 16 juillet, en s’approchant des rives de la Narew, Nicolas reçoit un éclat de shrappnell (force encaissée pareille à un lourd moellon) qui le propulse tête première dans la tranchée russe. Il se relève péniblement, la blessure située au plus près de la colonne vertébrale ne l’empêche pas de rallier seul un lieu de secours.
Un infirmier compte l’y emmener, il refuse disant que d’autres blessés méritent davantage de soins. On le retrouve le soir même au Garnisonslazarett de Belgrade.
Commentaire du chirurgien : « Sie haben Schwein gehabt ». (Vous avez eu beaucoup de chance ! ».
En septembre 1915, l’armée de von Below le récupère et le voilà en route vers Grodno, Dünaburg puis il stationne devant Riga. La Russie à genoux continue à se battre.
Il se méfie des tireurs d’élite russes ; même protégé derrière les boucliers de tranchée, le guetteur imprudent se fait trouer la cervelle par l’ennemi patient.
Les Russes entretiennent la guerre de position, mitraillant à l’aveuglette. Il se sort miraculeusement d’un tir d’obus brisant les hêtres massifs comme des allumettes.
La sécurité dans les positions mérite de savants travaux confiés aux pionniers bâtisseurs. Il érige ainsi de superbes tranchées protégées par d’imposants troncs d’arbres et des milieux de sacs de sable. Pour se prémunir du froid glacial, la section dort sur le fumier de cheval laissé à dessein dans les étables, mais, cruel sort, il retrouve un ami mort de froid à ses côtés.
Pour déstabiliser l’ennemi, il est rappelé avec d’autres camarades de génie pour aller « saper » des galeries sous les tranchées ennemies. Un « fourneau » provoqué par l’explosion souterraine transfigure le paysage.
C’est à cette époque, semble-t-il qu’il contracte la malaria.
Il file ensuite vers le Vieil-Armand (Hartmans villerkopf). Son copain Grosshenni de Mulhouse l’incite à déserter.
Il « fabrique » les cantonnements érigés à fleur de coteau pour accueillir les malheureux fantassins allant tâter d’adversaire français sur les crêtes vosgiennes. Sa « nationalité lorraine suspecte le propulse à nouveau vers l’Est.
Les tranchées allemandes (Stollen) sont sophistiquées : la propreté y est proverbiale. Le dispositif est sérieusement réfléchi. Assez profondément enterrés, à l’abri de l’aviation naissante, ces abris constituent des dortoirs relativement accueillants, tant les journées précédant l’attaque sont fastidieuses.
Pour regrouper autant d’unités, on les ramène de nuit plusieurs jours auparavant : le calme précède toujours la tempête.
Les routes sont « paraventées » par d’habiles camouflages et recouvertes de paille et de roseaux pour occulter le bruit d’approche des caissons d’artillerie.
Bien taillées, les tranchées se profilent en avant vers les Schengl (soldats français).
« Der Alte (Major) souhaitait me faire bénéficier de permissions à condition d’aller cisailler les barbelés, récupérer des indices chez l’ennemi. Je n’ai jamais voulu faire partie de ces soldats éprouvés.
Les petits postes se trouvaient disséminés à l’avant. En cas de matraquage sur les 1ères positions, un repli rapide s’effectuait vers une ligne salvatrice elle-même épaulée d’une seconde ligne garnie de renforts. La 3ème ligne, plus à l’arrière et souvent installée dans des contreforts calcaires était consolidée par des embrasures en béton. L’ensemble constituait un puissant défensif, une chenille imprenable.
Les barbelés démolis doivent sans cesse d’être reconstruits. Raide de boue, il participe à la préparation d’attaques où il s’agit de cisailler de nuit l’inextricable lacis de barbelés. Attention aux patrouilles et aux « Lichtkuglen » (lucioles).
Le manque de repères chronologiques m’oblige simplement à relever des anecdotes.
Le malheureux a subi plusieurs marmitages de gros calibres. Le trou creusé est la seule protection dans ce déluge de flammes. Les préparations d’artillerie se répètent le lendemain. Aucune végétation ne peut s’extérioriser dans cette terre retournée parsemée de cratères lunaires.
Parfois, pour reconsolider les tranchées éventrées, il faut gagner les emplacements sous l’éclatant flash des fusées éclairantes. Certains trous sont remplis de cadavres ; le chemin retour se fait à l’aveuglette, sans repères bien visibles.
La roulante-ce mot magique » réchauffe le cœur et le ventre du soldat transi.
Les Drachen et Fesselballon (ballons captifs) sont treuillés à 10km des lignes du front. L’avantage de pouvoir superviser les positions est contrebalancé de plus en plus par les avions qui enflamment les « saucisses ». Plus d’un malheureux aérostier victime d’une attaque s’écrase au bout d’un filin au moment où il s’apprête à s’y glisser du haut des ars.
Nicolas se retrouve également au mont Kemmel et à Ypres. Il court pour échapper aux gaz verdâtres. Une infirmière belge lui propose sans risque de déserter. Il hésite : l’occasion serait trop belle s’l n’y avait pas la petite famille.
Plus d’une fois il réchappe aux tirs légendaires du 75 français. Les artilleurs français sont d’une adresse diabolique, connaissant, grâce aux cartes d’état-major, chaque repli de terrain.
Il s’agit de sauver sa peau et traverser le barrage d’artillerie aux explosions rappelant la foudre meurtrière. Les chevaux refusent de tirer les lourdes batteries dès qu’ils sentent l’odeur de la poudre. Installation de lourds « Potonks » (pontons) sur la Weichsel (Vistule) charriant des monceaux de glace.
HOULLE Pit (Pierre)
Il est également incorporé malgré son jeune âge (17 ans). Sa mère veut intercéder auprès de la Kommandatur : 4 fils c’est trop. Peine perdue.
HOULLE Victor Jean
Tué près d’Ostende le 16/09/1915, il faisait partie du 3ème Régiment Infanterie Marine.
Ah ! La belle époque, me direz-vous. Comme la guerre s’enterre, les femmes vont aux champs. Une pièce d’or équivaut à plus d’un mois de salaire.
Années noires : le canon frappant à Verdun s’entendait tous les soirs à Farébersviller.