Au cours de l’été 1591, une armée protestante forte de plus de 20 000 hommes sous les ordre du prince d’Anhalt entra en Lorraine par Forbach pour aller porter secours au « roÿ de Navarre » (Henry IV). Elle assiégea en vain le château de Hombourg mais se vengea sur les localités voisines : 6 maisons furent incendiées à Petit Ebersviller tandis que Farébersviller connaissait un sort infiniment plus tragique. Plusieurs documents d’archives relatent ce fait et ses conséquences. Ils ne vont pas toujours d’une lecture aisée pour les contemporains de la fin du XXème siècle. Ils voudront bien considérer que cette prose a plus de 400 ans !
En octobre 1591 les habitants adressèrent aux autorités ducales une longue supplique où ils racontaient leurs malheurs.
« ...
A Monseigneur Illustrissime et Reverendissime
Cardinal de Lorraine,
Lieutenant Gnal de son Alteze en ses paÿs, pendant son absence
Remonstrent en toute humilité, les mannans et habitans du village de fereberschwiller obeÿssantz subiectz de Son Alteze, comme depuis n’aguerre au passage dernier des Reittres et gens de guerre du Roÿ de Navarre, ils seraient esté poursuivÿ, et contrainct par iceux de sÿ pres a toute rigueur dendurer beaucoup foulles et oppressions, mesmes les nourrir et entretenir de vivres provisions, et toutes autres choses quelconques a eulx nécessaires, adquoÿ (et a ce que dessus comme pauvres gens craindans de perdre leur vie, avec les moies suivant les menaces desdits gens de guerre.) Ilz auroient tasché de fournir et satisfaire ce neanmoingz non contant de tous cela a leur département d’illecques (=en les quittante) en auroient bruslé et mis en feu et flamme tout ledit village entièrement qu’estoit en nombre de trente cinq maisons, ensemble de granges fournies de graines avec toutes autres leur biens et meubles ÿ estant, n’ÿ restant plus rien que l’apparence d’ung lieu du tout ruÿné, de manière qu’eulx avec leurs pauvres femmes et petitz enffans en sont du tout appouvrÿz et reduictz en grande extremité et ruÿne… »
Ecrit vers le 16 octobre 1591
Les habitants demandèrent une exemption d’impôts, de corvés et guet pendant six années, afin de pouvoir rebâtir le village.
Une enquête des service de la Chambre des Comptes en date du 24 novembre 1591 signalait qu’à part l’église et la moitresse ducale (gagnage) tout le village avait effectivement été détruit (35 maisons + les granges contenant les « foins et blez ») L’avoine étant encore aux champs lors de l’incendie avait pu être sauvée.
Sur les 19 conduits présents au moment du désastre, il n’en restait déjà plus que 16 « lequel quoy que reduicts en grande nécessité ont bien voulu rebastir leurs maisons ». Vu l’appauvrissement de la population, elle n’avait pu payer pour 1591 que 42 francs en tout d’aide générale. Les services fiscaux l’exemptèrent de tout autre impôts pour 1591 et 1592 ; cependant les Farébersvillois restaient astreints au guet à Hombourg.
Deux ans plus tard, en mai 1593, la Chambre des Comptes s’inquiétait de savoir dans quel état se trouvaient Petit Ebersviller et Farébersviller. Cette dernière localité n’avait guère pu profiter des exemptions fiscales : la mauvaise conjoncture économique et la guerre persistante décourageaient les rebâtisseurs éventuels. L’enquêteur notait à propos de Farébersviller : « n’y encore point de maison rebastie, seulement ceulx quelque peu de moien ont au moins mal recommodé les murailles de leurs maison et icelles faict couvrir de paille pour se conserver contre le froid et la pluye, et tout sans cela n’ont laissez d’estre visitez par les gens de guerre (= et malgré cela, ils ont eu la « visite » des gens de guerre), de manière que c’est grande pitié d’eulx et néanmoins chacun conduit est cottisé à 15 gros par mois pour ledit ayde dernier sans moien de les payer … »
Il ne restait en mai 1593 que 12 « feux » à Farébersviller.
En 1596, une armée espagnole sous les ordres du Cardinal d’Autriche passa par la seigneurie et selon les propres termes des habitants, elle « ruyna beaucoup »
Dans ces conditions, rien d’étonnant qu’en 1596 le nombre des feux n’était toujours pas plus élevé que trois ans auparavant. Il faudra attendre la première décennie du XVIIème siècle pour voir le village panser entièrement ses plaies matérielles et retrouver sa population des années 1585.
En octobre 1591 les habitants adressèrent aux autorités ducales une longue supplique où ils racontaient leurs malheurs.
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A Monseigneur Illustrissime et Reverendissime
Cardinal de Lorraine,
Lieutenant Gnal de son Alteze en ses paÿs, pendant son absence
Remonstrent en toute humilité, les mannans et habitans du village de fereberschwiller obeÿssantz subiectz de Son Alteze, comme depuis n’aguerre au passage dernier des Reittres et gens de guerre du Roÿ de Navarre, ils seraient esté poursuivÿ, et contrainct par iceux de sÿ pres a toute rigueur dendurer beaucoup foulles et oppressions, mesmes les nourrir et entretenir de vivres provisions, et toutes autres choses quelconques a eulx nécessaires, adquoÿ (et a ce que dessus comme pauvres gens craindans de perdre leur vie, avec les moies suivant les menaces desdits gens de guerre.) Ilz auroient tasché de fournir et satisfaire ce neanmoingz non contant de tous cela a leur département d’illecques (=en les quittante) en auroient bruslé et mis en feu et flamme tout ledit village entièrement qu’estoit en nombre de trente cinq maisons, ensemble de granges fournies de graines avec toutes autres leur biens et meubles ÿ estant, n’ÿ restant plus rien que l’apparence d’ung lieu du tout ruÿné, de manière qu’eulx avec leurs pauvres femmes et petitz enffans en sont du tout appouvrÿz et reduictz en grande extremité et ruÿne… »
Ecrit vers le 16 octobre 1591
Les habitants demandèrent une exemption d’impôts, de corvés et guet pendant six années, afin de pouvoir rebâtir le village.
Une enquête des service de la Chambre des Comptes en date du 24 novembre 1591 signalait qu’à part l’église et la moitresse ducale (gagnage) tout le village avait effectivement été détruit (35 maisons + les granges contenant les « foins et blez ») L’avoine étant encore aux champs lors de l’incendie avait pu être sauvée.
Sur les 19 conduits présents au moment du désastre, il n’en restait déjà plus que 16 « lequel quoy que reduicts en grande nécessité ont bien voulu rebastir leurs maisons ». Vu l’appauvrissement de la population, elle n’avait pu payer pour 1591 que 42 francs en tout d’aide générale. Les services fiscaux l’exemptèrent de tout autre impôts pour 1591 et 1592 ; cependant les Farébersvillois restaient astreints au guet à Hombourg.
Deux ans plus tard, en mai 1593, la Chambre des Comptes s’inquiétait de savoir dans quel état se trouvaient Petit Ebersviller et Farébersviller. Cette dernière localité n’avait guère pu profiter des exemptions fiscales : la mauvaise conjoncture économique et la guerre persistante décourageaient les rebâtisseurs éventuels. L’enquêteur notait à propos de Farébersviller : « n’y encore point de maison rebastie, seulement ceulx quelque peu de moien ont au moins mal recommodé les murailles de leurs maison et icelles faict couvrir de paille pour se conserver contre le froid et la pluye, et tout sans cela n’ont laissez d’estre visitez par les gens de guerre (= et malgré cela, ils ont eu la « visite » des gens de guerre), de manière que c’est grande pitié d’eulx et néanmoins chacun conduit est cottisé à 15 gros par mois pour ledit ayde dernier sans moien de les payer … »
Il ne restait en mai 1593 que 12 « feux » à Farébersviller.
En 1596, une armée espagnole sous les ordres du Cardinal d’Autriche passa par la seigneurie et selon les propres termes des habitants, elle « ruyna beaucoup »
Dans ces conditions, rien d’étonnant qu’en 1596 le nombre des feux n’était toujours pas plus élevé que trois ans auparavant. Il faudra attendre la première décennie du XVIIème siècle pour voir le village panser entièrement ses plaies matérielles et retrouver sa population des années 1585.