Farébersviller, le 9 juillet 1945.
Chère Marraine,
Nous avions si peur dans la cave pendant la bataille. Mon petit frère Ernest ne faisait que prier, comme nous. Jamais il n’a été aussi sage. Notre vieil oncle et la tante pleuraient. Ils croyaient toujours que c’étaient leurs derniers jours. Et les Allemands ne voulaient pas quitter notre pauvre village.
Je pensais souvent aux autres enfants du village. J’avais peur de ne plus les retrouver vivants. Quand je suis sortie la première fois, les Américains faisaient un nouveau pont sur le ruisseau au milieu du village. J’étais si contente en les voyant.
Mon papa est rentré du camp en Allemagne. Maman ne pleure plus et nous sommes heureux. Mon petit frère Ernest n’a pas reconnu papa. Il ne l’avait vu que deux fois. Il est né le13 février 1943 et papa a été déporté le 12 janvier 1943.
Il lui disait toujours « oncle » les premiers jours. Maintenant encore, il regarde quelquefois papa de côté. Cela nous fait rire.
Bien bons baisers de votre filleule.
Armande Egloff, 13 ans.