Flauder Lucien de Théding

 

 

Journée du 4 décembre 1944 :

Il y eut vers les 6 heures du matin, un formidable tir d’artillerie U.S. sur Théding et les villages environnants, lequel se prolongea jusqu’à 8 heures. La bataille fit bientôt rage.

Des Allemands aux manches retroussées tenaient leurs mitrailleuses bien calées sur leur trépied pour affronter l’avant-garde U.S.

 Sur les coups de 11 heures, des soldats américains se présentèrent devant notre cave et demandèrent aux quarante-trois personnes la fréquentant (dont moi-même), de quitter au plus vite l’endroit.

Des grenades éclataient encore, des rafales de mitraillettes continuaient à s’entendre dans les rues du village.

« Next village » : je compris à l’expression des soldats que l’attaque avait réussi et que les G.I.’s faisaient maintenant mouvement vers Diebling, Ebring et Tenteling.


Le temps était glacé : pluie et neige fondue étaient de la partie, ce qui n’empêchait pas certains soldats (ou reporters de guerre) de filmer le théâtre de leurs opérations. On nous avait envoyés sans ménagement vers Farébersviller : sans doute, craignait-on du côté U.S., une contre-attaque allemande qui aurait pu provoquer des victimes civiles ? Des tanks venus du secteur du Brouskir prêtaient main forte aux fantassins.

Je pataugeais dans les profondes ornières laissées par les chenilles. Par mesure de précaution, mon père avait insisté pour que je mette mes chaussures ce matin-là. Sa prévoyance me rendait un fier service dans la gadoue, là où certains de mes concitoyens perdaient pied, c’est-à-dire leurs pantoufles !

En cheminant, je fus intrigué par la présence insolite de tas de fumier étalés dans les prairies : hélas, ces formes se révélèrent être des cadavres de soldats alliés, recouverts de toile kaki. J’en distinguais une bonne cinquantaine, sinon plus. A mon avis, ces malheureux furent tués par des mitrailleuses lourdes sMG 42 lorsqu’ils s’avancèrent en groupes compacts et à découvert, vers l’entrée de Théding.

 

Trois jours après, un Thunderbold P 47 atterrit sur le ventre dans la cuvette de Théding (direction Diebling au lieu-dit Breitwiese). Le pilote, blessé à la tête réussit à entrouvrir le cockpit, sous nos yeux stupéfaits.  En effet, avec trois autres camarades, j’avais assisté de loin à son atterrissage forcé. Sept ou huit autres avions de la même formation passèrent plusieurs fois au-dessus des lieux du crash. Bientôt une ambulance frappée de la Croix-Rouge le récupéra.